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Un homme de 61 ans s’est présenté aux urgences avec une fatigue et une irritabilité croissantes, qui avaient débuté 2 mois auparavant dans un contexte de rétention urinaire due à une hypertrophie bénigne de la prostate. Un mois plus tard, il a été opéré avec succès, mais son anxiété a fortement augmenté en association avec une baisse de l’humeur, une anhédonie, un manque de motivation, une mauvaise concentration et une diminution du sommeil et de l’appétit. Il n’avait pas d’intention suicidaire. Un épisode dépressif majeur sévère a été diagnostiqué.

Les antécédents du patient ont montré plus de 10 épisodes de dépression non traités et non diagnostiqués, d’une durée allant d’une semaine à plusieurs mois. Il n’avait pas d’antécédents de tentatives de suicide, d’épisodes (hypo)maniaques, de délires ou d’hallucinations. Il a nié avoir consommé des drogues. Il ne fumait pas et buvait de l’alcool à l’occasion. Quelques traits obsessionnels-compulsifs ont été identifiés.

L’histoire familiale a révélé que son frère s’est suicidé à l’âge de 27 ans. Sa mère, ses 2 oncles maternels et son grand-père paternel ont tous pu souffrir de dépression.

Le patient a été admis à temps plein dans le service psychiatrique pendant 1 mois, puis en hospitalisation de jour pendant 2 mois. Il a ensuite été traité avec jusqu’à 40 mg d’escitalopram, un antidépresseur recommandé en première intention1, et 50 mg de trazodone pour le sommeil. Une rémission partielle a été observée pendant plusieurs semaines. Le bupropion a ensuite été ajouté pour améliorer l’efficacité, mais il a rapidement été arrêté en raison d’une rétention urinaire accrue. Lors de son entrée dans notre programme de soins ambulatoires, les scores2 d’auto-évaluation du patient au Quick Inventory of Depressive Symptomatology (QIDS) atteignaient 20 sur 42. La trazodone a été remplacée par 15 mg puis 30 mg de mirtazapine pour son effet sur l’anxiété et le sommeil, mais la mirtazapine a ensuite été arrêtée en raison d’une intolérance. En raison de l’absence d’amélioration après 12 semaines, l’escitalopram a été remplacé par la venlafaxine XR, un autre antidépresseur efficace en première intention3, et la dose a été progressivement augmentée sur 2 mois pour atteindre 375 mg/j. Le patient a atteint un état de rémission partielle (QIDS = 11), mais se sentait encore fonctionnellement altéré, comme le confirmait le questionnaire sur la qualité de vie (Quality of Life Enjoyment and Satisfaction Questionnaire).4 A noter que le patient était particulièrement compliant et actif dans son traitement, qui comprenait une thérapie cognitivo-comportementale individuelle et une activité physique.

Le lithium a ensuite été introduit dans une stratégie d’augmentation, avec une dose allant jusqu’à 900 mg/j et un taux plasmatique de 0,6 mmol/L en 1 mois. Le lithium, plutôt que les antipsychotiques, a été utilisé comme agent d’appoint principalement en raison des antécédents familiaux de dépression et du nombre d’épisodes dépressifs, qui ont été précédemment associés à la réponse à l’augmentation du lithium.5 Des effets secondaires, notamment des tremblements et une instabilité posturale, ont été observés. Les scores de dépression et de qualité de vie ont commencé à s’améliorer rapidement au cours du mois suivant. Deux mois après l’introduction du lithium, une rémission complète a été signalée. Cet état s’est maintenu pendant 12 mois et a permis au patient de reprendre son travail. Le lithium a ensuite été interrompu sur 3 mois, puis la venlafaxine a été arrêtée sur 6 mois, sans qu’aucune rechute ne soit signalée à ce jour.

Le cas de ce patient illustre les avantages potentiels du lithium dans le traitement aigu de la dépression unipolaire. Les effets secondaires, la marge thérapeutique étroite et les dépistages sanguins et urinaires réguliers6 expliquent la réticence de certains cliniciens à prescrire du lithium. Cependant, il reste un médicament d’augmentation efficace et à action rapide, comme l’a révélé une méta-analyse.7 L’étude STAR*D a montré que jusqu’à 16 % des non-répondants au stade 3 pouvaient bénéficier d’une adjonction de lithium.8 Il a été recommandé comme traitement d’appoint de première intention pour la dépression unipolaire par les lignes directrices CANMAT 2009,1 bien que certaines revues y soient moins favorables.9 De plus, l’adjonction de lithium peut également être plus rentable que l’adjonction d’antipsychotiques atypiques.10 Une méta-analyse récente11 a également confirmé que le lithium est un puissant médicament antisuicide, une conclusion particulièrement pertinente dans le cas présent étant donné les antécédents familiaux de notre patient. Le lithium doit être utilisé à des niveaux sanguins compris entre 0,5 et 0,8 mmol/L, et les données éparses suggèrent que si le traitement est efficace, il doit être maintenu pendant une période d’au moins un an pour éviter les récidives.12 Enfin, bien que les mécanismes antidépresseurs soient largement inconnus, le soutien aux effets neuroprotecteurs a été convaincant.13 Bien que le lithium ne soit pas une panacée, la littérature soutient une utilisation plus large de ce médicament.

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